LIVING FLOWERS

Keiichirô Muramatsu
Mathieu Merlet Briand 

Curaté par STRATA

du 2 au 5 juillet 2020

13h-19h

“L’univers entier est contenu dans une seule fleur » _ Toshiro Kawase

LIVING FLOWERS, traduction de la pratique japonaise de l’art floral Ikebana (生け花), est une exposition qui cherche à illuminer et questionner la frontière entre le naturel et l’artificiel, à travers le travail de deux artistes, Keiichirô Muramatsu et Mathieu Merlet Briand.

Pour sa série de photographies, Struct (2017), Keiichirô Muramatsu s’est inspiré des tremblements de terre au Japon en 2011, moment qui a mis en évidence la relation entre la nature et l’impact l’humain exerce sur elle. Dans le Japon ancien, les tremblements de terre étaient considérés comme l’une des forces significatives impliquées dans « l’harmonie et l’équilibre ». Il se pourrait bien que le moment soit venu de revoir ce qu’est «l’équilibre entre l’humanité et la nature».  

Dans Struct, Keiichirô sélectionne des formes à base de fleurs – objets organiques – et des formes à base de pierres – objets inorganiques – et les juxtapose. Les caractéristiques de la « reproduction mécanique » et de la « représentation numérique », qu’offre la photographie aujourd’hui, permettent la création d’une nouvelle structure, aboutissant à une nouvelle fusion entre les éléments.  

Le style Ikebana dit nageire, l’art de l’arrangement floral consistant à déposer des fleurs sauvages dans un support quelconque, constitue un point de départ du travail de Keiichirô. Pour ces tirages, Keiichirô utilise ensuite la technique Fresco Giclee, un support d’impression inventé par Tokuyama Corporation avec laquelle le principe des fresques (Fresco) et la technologie de l’impression jet d’encre sont combinés.

Dans la nouvelle série d’œuvres de Mathieu Merlet Briand, l’artiste rend hommage aux Impressionnistes. Les titres et les sujets de ses œuvres, tels que #WATERLILIES study (2020), sont des références directes aux œuvres de cette période de l’histoire de l’art. Il faut rappeler que les peintres de ce mouvement ont su tirer profit du divisionnisme des couleurs inventées par Chevreul, étude qui mèneront par la suite à l’invention du pixel de nos écrans. De plus, ce mouvement et cette quête de représentation d’une impression du réel serviront de prémices à l’histoire de l’abstraction. Ayant passé sa jeunesse sur les bords de seine, Mathieu s’inscrit sur les pas de ces peintres. Tout comme le chevalet a facilité l’impressionnisme, permettant à l’artiste de sortir de l’atelier et d’incorporer la lumière naturelle, internet permet à Mathieu d’absorber une source riche et quasi infinie de données visuelles, qu’il tisse ensemble pour créer ses œuvres à la limite de l’abstraction. 

En effet, le travail de Mathieu découle des milliers d’images correspondantes aux recherches faites sur un sujet donné, tel qu’un nénuphar (water lily), qu’il reconfigure ensuite méticuleusement à l’aide de processus numériques. Le résultat est une œuvre d’art qui semble reprendre vie lorsqu’elle réagit à la lumière qui l’entoure. Ce qui pourrait être vivant dans l’œuvre de Mathieu n’est donc pas seulement le dynamisme des couleurs et des formes qui jaillissent le sujet, mais également la nature en constante évolution des données qui lui servent de matière première. 

Dans Living Flowers, les deux artistes se réapproprient ou recyclent cette matière première organique qu’est la fleur. Cela nous amène à nous demander, que reste-t-il de la fleur une fois passée à travers le prisme de l’intervention humaine ? De quelle manière le superficiel humain (objets, matières, images, informations) altère-t-il notre perception de la nature et du vivant ? 

Stefano VENDRAMIN
STRATA